Quelqu'un de chez nous qui s'en va !

Parcours scolaire.
Victor entre à l'externat de St Berthuin où il fait 5 années primaires. Puis, un an de préparatoire à l'Institut l'amène aux humanités modernes (les seules existant à cette époque à St Berthuin) qu'il par-court normalement. Fils de professeur, il peut profiter du statut d'externe, ce qui est un privilège raris-sime.
C'est encore la grande époque de la maison : maîtres exigeants, travail intense qui se prolonge obliga-toirement dans les murs de l'école les dimanches après-midi, grandes festivités, défilés avec tambours et trompettes, salut au drapeau, salle de cinéma supérieurement équipée où les internes se rassemblent le dimanche soir pour des films très actuels.
Tout ça sentait un peu le militaire, mais ce n'est pas vers cet horizon que les goûts de Victor se préci-sent : très vite, il se sent attiré par une disponibilité sociale, le contact avec les gens et c'est à la méde-cine qu'il pense.
Mais, tradition oblige, en tant que futur disciple d'Hippocrate, il lui faudra ajouter à son diplôme d'humanités modernes, une maîtrise de la langue latine qui, on le sait, à ce moment menait partout et … nulle part. Aussi, notre homme va se farcir des cours de latin avec des Frères de l'Institut, qui le conduiront, plaisir suprême, n'en doutons pas, à la traduction du Pro Milone et au Jury Central. Réus-site sur tous les plans, y compris celui de candidat ingénieur civil, cartouche de réserve à utiliser dans le cas où la connaissance de la langue de Cicéron n'aurait pas été suffisante ( ! ! !) pour assimiler les connaissances médicales exigées.
L'université.
Leuven s'ouvre donc tout large à l'appétit de Victor d'abord un peu décontenancé par la différence de milieu mais qui se donne à fond pendant ses premières candidatures, rééquilibre ensuite travail et dis-tractions (1),achève sans histoire les 6 années de sa formation.
De certains professeurs de l'époque, il a gardé le souvenir de personnes alliant bagage scientifique et habileté pédagogique. Ces dernières attribuaient beaucoup d'importance à la pratique des examens cli-niques (qui, par la suite ont été en partie escamotés par les examens techniques) : attitude de bon sens qui a toujours été celle de Victor et que bon nombre de ses patients lui reconnaissent.
Une dernière année de stages à la clinique St Camille de Namur et à Ottignies lui donnera l'occasion de rencontrer des patrons célèbres comme Van Lantschoot et Koerperisch, personnes très exigeantes mais qui laissaient à leurs stagiaires beaucoup de responsabilités.
Quelques remplacements à Bousval et à Franc-Waret sous le regard tutélaire de confrères en congé lui apporteront beaucoup avant de venir, finalement, s'installer à Malonne dans la maison de ses parents.
La place du Fonds et, peu après, la rue des Trieux, devenue il y a peu les Tris, vont lui permettre de plonger des racines en compagnie de Béatrice, une jeune professeure, venue, Dieu sait pourquoi, du lointain pays de Mons, où son père, Mr Georges Fourez fonctionnait à Péronnes-les-Binche dans une école d'enfants de mineurs qui allait disparaître avec la faillite des charbonnages. Compagnon de classe de Mr Ferdinand Wilmot, Georges Fourez sera appelé par ce dernier à prendre en charge la1ère année primaire jusqu'alors gérée par le frère Mathias.
Le métier de médecin.
Très vite, ce qui a frappé Victor et qui a été un soutien, c'est l'importance des relations entre lui et ses patients. Sans rejeter l'aspect technique, il privilégie l'écoute, l'explication simple et paisible, qui per-mettent d'échapper à l'inquiétude dévorante, à la nervosité, voire à l'agressivité. Précis, rapides et clairs, ses diagnostics ne revêtaient jamais de dramatisations inutiles, d'affirmations péremptoires, ce qui facilite la prise en charge de ce qui est à faire.
Des moments forts : la réanimation par massage cardiaque, le contact avec les jeunes de l'I.M.P. où pendant 40 ans, entouré d'une bonne équipe d'auxiliaires, il parvient à assurer une bonne communica-tion avec un public difficile.
Des heures plus difficiles, aussi : des personnes qui échappent à ses soins malgré tous ses efforts ; des " têtus " qui refusent l'aide qui s'avère pourtant urgente.
L'abondance du travail, également : il n'était pas rare, avant l'arrivée de jeunes confrères, que les jour-nées se terminent à 21-22h., rendant ainsi aléatoire la pratique de l'un ou l'autre hobby comme la pho-to, le vélo, le tennis.
Un point d'appui : les recyclages imposés ou choisis, suivis seul ou avec confrères, qui lui ont permis de rester en contact avec les collègues, les progrès des sciences médicales et pharmacologiques.
Autre support important, voire essentiel : la présence de son épouse qui contribue, pour une bonne part, à la qualité de contact avec les gens : c'est elle qui répond au téléphone, écoute, rassure, promet de pas-ser l'information, de faire le nécessaire. Après une courte expérience d'enseignement, Béatrice, se ren-dant compte de la nécessité d'une présence auxiliaire auprès de son mari, décide d'assumer ce travail qu'elle fera avec plaisir, titillée cependant sur la fin par l'envie de devenir une grand-mère plus dispo-nible à ses petits-enfants.
Et la suite ?
Depuis longtemps Victor s'est promis de ne pas faire le même boulot jusqu'au bout. Les complications administratives et incidences fiscales l'ont amené à renoncer à toute activité médicale sans cependant sortir du milieu médical puisqu'il reste inscrit au S.S.M.G. (Société scientifique de médecine générale).
La vie actuelle offre de multiples possibilités : initiation à l'informatique qui le tente, cours à l'UTAN, voyages, la marche, l'horizon de St Jacques de Compostelle auquel il a déjà beaucoup pensé ; une pré-sence plus grande dans la C.S.D.F.M. (coordination des soins à domicile de Floreffe et Malonne) ASBL qu 'il a contribué à fonder et dont il a été 6 ans président.
En souriant, Béatrice revient sur son désir de disponibilité plus grande aux générations qui suivent, sur l'envie d'une information sur la décoration.
A Dieu va
La porte de la maison des Tris se ferme ; une autre s'ouvre à Le Roux, dans une maison familiale, lieu d'origine des parents et grands-parents. Le coin est paisible, spacieux et permet un calme que le trafic actuel de la rue des Tris a, depuis un moment, fait disparaître.
C'est de tout cœur que Malonne Première et tous ceux qui ont bénéficié de leur attention souhaite à Victor et Béatrice une longue et bonne route, avec, de temps à autre un petit détour par Malonne.

(1) lire " guindailles "

 

Photos : G Bouchez