Tous
les jouets sont faits de bois, de feutrine, de laine de cuivre, de matériaux
naturels. Pour la plupart, ils ont été confectionnés
par les parents et la jardinière. Ils sont doux, chauds et de texture
variée sous les doigts enfantins. Jouer est le travail le plus sérieux
du petit enfant ; c'est dans cette activité qu'il construit le plus
sûrement l'Homme, qu'il sera demain, avec ses qualités individuelles.
Dès l'arrivée à l'école, juste après
l'accueil dans le petit " salon ", où sont racontées
les histoires, les enfants jouent librement dans le living jusqu'à
l'ivresse, ils déplacent à leur gré tous les objets,
entrent parfois en conflit avec leurs compagnons pour un espace ou un objet
très convoité. Ils apprennent à les résoudre
par la négociation, développant tolérance et respect
de l'autre ; ils apprennent à se connaître eux-mêmes
et découvrent leurs dons respectifs au fil de leurs jeux. Ces découvertes
leur donnent confiance et force pour leur avenir.
La jardinère a aussi à coeur de stimuler en chacun l'autonomie
et la responsabilité de ses actes, en lui confiant de petites tâches,
adaptées à son âge et à sa maturité. Voici
que, dans un chant, elle invite chacun à recevoir une noisette, une
poignée de raisins secs, une amande... Tous savent que le temps du
jeu se termine et qu'une petite tâche de rangement particulière
les attend ; chacun s'y adonne avec sérieux, en aidant les plus petits.
Le jardin d'enfants retrouve son visage calme et harmonieux. Un enfant a
distribué les serviettes sur la table à manger, chacun a la
sienne, brodée d'un petit fruit ; il en est responsable, procédant
même à sa lessive au jour dit. Le même petit fruit lui
sert aussi à reconnaître son sac à pain, son sac de
linge, sa planche à peinture. Chaque jour, en effet, notre maison-école
bourdonne d'une activité particulière : le lundi, c'est parfois
la confection d'une soupe ou de biscuits ; le mardi est le jour consacré
à l'aquarelle ; le mercredi voit naître de petites mains habiles
broderies, chaînettes, tissages, pompons ; le jeudi est le jour du
pain ; le vendredi celui de la psychomotricité, de rondes et de jeux.
Après cette activité, une collation est servie (venant de
l'initiative des parents) avec une tisane aux saveurs fleuries. Quel bonheur
pour les enfant ce moment de repos avec les compagnons de jeux ! Ils y retrouvent
souffle et nouvelles forces. Chacun demande vivement alors à participer
aux tâches de l'intendance : l'un essuie la table, un autre rassemble
les serviettes, un autre prépare le panier où dorment les
bottes ou dispose un panier qui recevra les pantoufles, car, chaque jour,
(excepté par gros temps !) tout ce petit monde va saluer la nature
dans les bois proches.
Cependant avant cela, il y a encore l'heure du conte au petit salon. Sur
la " table des saisons ", où sont rassemblés des
éléments de la vie naturelle en rapport avec les saisons,
princes, princesses, sorcières, lutins, petites elfes, le meunier,
le berger, la marchande, la grand-mère, St Nicolas, le lapin de Pâques,
sans oublier les moutons, les canards, le coq, le renard, l'ours brun et
tant d'autres... chacun à leur tour va s'animer sous la main de la
jardinière ; dans le (presque) silence la vie des sentiments enfantins
aussi se met en mouvement .. mais, chutt ! Ca, c'est leur secret ! L'enfant
quitte cet endroit de rêve, calme ou parfois songeur, ou plein de
commentaires et de questions..
L'enfant aspire à présent à se mettre pleinement en
mouvement, à courir, à grimper, à sauter dans les bois.
Tous ont envie d'être autonomes dans l'habillage et y travaillent
avec une volonté étonnante. En promenade, un ver de terre,
un escargot, un minuscule champignon, des chevaux dans la prairie... Tout
attendrit les petits, qui posent mille " pourquoi ? ". Dans la
poche, on fourre vite un joli caillou pour maman. Ce bâton dans la
main, sacre l'enfant berger, vacher, pècheur, bûcheron ou tout
ce que souhaite sa riche imagination
Du bois, l'enfant revient avec les yeux brillants, les joues colorées.
Il se déshabille en bâillant, plonge des mains noires dans
l'eau tiède d'une bassine et découvre les multiples pouvoirs
du savon. Mais, cette fois, maman n'est plus loin : peut-être revient-elle
reprendre son petit, peut-être lui a-t-elle préparé
un pique-nique, que de petites mains fébriles découvrent avec
délices. Quelques soupirs... Ils sont fatigués et rejoignent
une couche bienfaisante, avec leur ami de peluche préféré
! La plupart s'envolent dans un autre monde réparateur, deux longues
heures durant.
A leur réveil, le regard lavé de toute fatigue, ils rangent
leur couchage et écoutent une mélodie douce jouée par
la jardinière sur la lyre ou une nouvelle histoire. Leur maman tant
désirée n'est plus loin !
Cette petite école maternelle est privée, libre et non
confessionnelle ; elle a été fondée par quelques
familles en 1999, qui l'ont nommée : " le jardin des deux
pays ". Elle applique la pédagogie Wal-dorf (ou Steiner).
Elle peut accueillir neuf enfants, entre deux ans et demi et six ans.
A-M Debrabandere
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